***Article(s) en date du 6.5.07***

Procuration au rabais

Dimanche, 6 mai 2007, second tour de l'élection présidentielle française. A voté.

A voté, mais ne sais pas pour qui. Au premier tour, j'avais fait mon choix de candidat parmi les douze en plein dans l'isoloir. Et j'avais un peu l'impression d'avoir de la merde au bout des doigts en glissant le bulletin dans l'enveloppe. Mais hors de question de voter blanc tant que les blancs ne seront pas pris en compte dans le résultat final. Etrange, moi qui n'ai pas raté une seule élection depuis mes 18 ans, et qui ait toujours su des mois a l'avance pour qui voter, et pourquoi.

En sortant de l'isoloir le 22 avril, j'avais déjà pris ma décision quant à mon vote du second tour : j'allais voter par procuration. Pourtant, je me déplacerais quand même : la finalité du vote serait tranchée par une petite pièce. Pile, candidat 1, Face, candidat 2. Simple, efficace. A l'annonce des résultat du premier tour j'ai décidé que ma procuration irait à une petite pièce de 10 cents que j'ai gardé en poche jusqu'à tout à l'heure.

En deux semaines, techniquement, je pense que mon intention de vote aurait pû changer (elle a d'ailleurs bien failli changer, cf plus bas). Mais rien de ce que j'ai vu ou ouï des deux candidats n'a fait vaciller ma résolution durant ces 14 jours. Vois tu, jeune lecteur, jolie lectrice, toi qui es fidèle à mes élucubrations bloggesques depuis des années, tu sais que je suis de droite, Juppéiste convaincu. Le vote "logique" aurait donc été Sarkozy. Il a un programme et des idées proches des miennes, il est efficace (certains diraient quel qu'en soit le prix !) et s'il est élu son gouvernement sera formé de gens efficaces de droite. Seulement voilà, "Sarko", je ne l'aime pas. Pas parce que les media l'ont diabolisé, ni pour toutes les "mauvaises" raisons que je vois rabachées à longueur de journée par des gens qui ne comprennent même pas la moitié des idées qu'ils avancent. Non, je ne l'aime pas parce que c'est le genre de type à qui j'ai envie de dire "p'tit con", parce qu'il est au moins aussi égocentrique que moi, mais c'est un requin qui n'est préoccupé que par sa propre position et qu'il est prêt à tout pour y arriver. Et c'est pas "grave" qu'il y arrive, puisque le vrai pouvoir est entre les mains du gouvernement, et pas du chef de l'Etat. Mais c'est une réaction allergique. Les gens qui poussent des capricent et tape du pieds en disant "je veux", j'ai toujours fait mon possible pour ne pas les satisfaire. Peut être inconsciemment parce qu'ils me rappellent le sale gosse que j'étais.

Arrive la miss-d'en-face. Ne vous laissez pas berner par l'étiquette : Segolène Royal n'est pas une candidate de gauche. En fait, dans un sens, c'est presque une meilleure candidate UMP que le petit Nicolas. Quand elle ne lit pas un script préparé, quand elle parle impulsivement (comme ça lui arrive très, trop souvent, ce qui lui aura probablement coûté la victoire si elle perds), ses idées sont clairement de droite. En plus, l'idée d'une présidentE me séduit, j'avoue, même si c'est une femme encore plus dévorée par l'ambition que Sarkozy (prète à écraser tout le monde, même ses collègues et son flan de conjoint, pour "résussir"), c'est une belle vitrine pour les pays étrangers. Qui est somme toute le seul pouvoir et le seul intérêt actuel du chef de l'Etat en France. Et puis avouez que pour un *baron*, élire quelqu'un qui s'appelle *Royal*, c'est cocasse. Mais le gros problème de Royal, c'est son camp. Car si elle est élue, elle a beau être de droite, elle aura un gouvernement de gauche, qui fera appliquer une politique de gauche. Et donc, comme durant les années Mittterrand ou les Jospinades, le pays va être de plus en plus endetté et renforcer l'assistanat pour finir par s'enliser encore plus...

Donc, un choix difficile, et une auto-interdiction morale de voter blanc. D'où la pièce. Néanmoins, une chose a failli me faire changer d'avis et choisir un candidat. La Ligue des Droits de l'Homme a pris position cette semaine pour appeler à voter Royal. Décision gerbatoire au possible, au mieux c'est une insulte pour Sarkozy, au pire c'est que la LDH elle même est tombé dans le piège de la diabolisation des media, mais probablement c'est entre les deux, elle a simplement contribué à cette manipulation de dernière minute de plusieurs entités apolitiques mais à tendance plutôt gauchiste de faire renverser le résultat de l'élection. C'est tellement simple (et tellement efficace, pour les masses bovines populaires françaises) que j'ai bien failli voter Sarkozy délibérément, rien que par réaction à cette annonce, pour contrebalancer comme je peux les voix esprits faibles qui se seraient laissées convaincre par cet ultime appel. Mais non, je n'ai pas pu me résoudre à voter délibérément Sarkozy. Mon vote Sarkozy serait dû à la synchonicité et au choix de la pièce, ou ne serait pas.

C'est donc armé de ma petite pièce que je me suis introduit dans l'isoloir. Et afin de ne pas ressasser mon choix pendant des semaines en me disant "mais... et si j'avais voté l'autre plutôt ?", j'ai décidé de pimenter le jeu. J'ai mélangé les deux bulletins que j'ai posé face cachée dans l'isoloir. Pile, bulletin de droite, Face, bulletin de gauche. Pour les curieux, la pièce a choisi "Face", j'ai donc, en faisant bien attention de ne pas voir ce qu'il y avait dessus, inséré rapidement le bulletin dans l'enveloppe, et j'ai fui l'isoloir rapidement afin de ne pas avoir la tentation de regarder quel était le nom écrit au dos du bulletin que j'avais, du coup, laissé seul dans l'isoloir. Vous savez qu'en bon disciple de Wilde, je résiste à tout, sauf à la tentation.

Donc j'ai voté, je n'ai pas voté blanc, mais je ne sais pas pour qui j'ai voté. Dans un sens, je me dis que quel que soit le résultat de ce soir je pourrai crier victoire, que ce soit "Sarko" (ouais ! La droite a gagné !) ou "Ségo" (ouais ! Sarkozy a perdu !), mais je me dis surtout que quel que soit le résultat de ce soir je pourrai dans un sens me dire "on a perdu"... En tout cas, vivement les 10 et 17 juin, car ces élections là, bien que sacrément moins populaires et mediatiques --ce qui prouve encore que les français ont tout compris à la politique, ironie inside--, seront bien plus importantes, et là je ne voterai ni blanc, ni au hazard en tout cas !

Un peu de pub avant de vous laisser tranquille, l'une de mes jolies élèves dont le nombril est immortalisé dans mon Nombriloscope vient de rejoindre le cercle élitiste et très fermé des bloggeurs littéraires. Seulement trois articles pour l'instant mais gageons que ça va s'étoffer, et vu que pour l'instant ça me plait, eh bien si vous venez régulièrement ici, ça devrait aussi vous plaire. Donc allez faire un tour sur le blog de la p'tite huitre...

La citation du jour : "Hum, ne me dis pas que tu as mis le papier au pifomètre, tout de même?"
La chanson du jour : la vie par procuration, Jean-Jacques Goldman, "Mais finalement de moins pire en banal, Elle finira par trouver ça normal"

Même si c'est vraiment une élection de merde, la vie est belle !

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